"Tu chantes avec les autres tandis que les phonographes galopent"
Guillaume Apollinaire, "Arbres".

A l'occasion du finissage de l'exposition "The Ghost in the Machine" inspirée du roman "L'Eve Future" de Villiers de L'Isle-Adam, l'artiste Aleksander Kolkowski a enregistré le 4 décembre au Bon Accueil (Rennes) et en public sur cylindre Félicia Atkinson, Pierre Bastien, Dinah Bird et Anne-James Chaton.
Ce re-enactment de cessions d'enregistrements phonographiques s'inspirait pour partie des écrits d'Apollinaire qui durant la Première Guerre mondiale proposait d'utiliser le phonographe pour créer une poésie simultaniste et phonographique ainsi que des disques poétiques. Il s'agissait de combiner, superposer plusieurs voix mais également des bruits en ayant recours au phonographe. Il cite par ailleurs Villiers de L'Isle-Adam comme précurseur du simultanéisme, celui-ci ayant d'après le poète publié "une pièce où un grand nombre de voix parlaient en même temps disant, des choses différentes."
Les écrits d'Apollinaire ainsi que ceux de l'artiste hongrois László Moholy-Nagy qui souhaitait faire du gramophone un outil de création plus que de simple reproduction, témoignent de la vigueur des idées transformant les technologies de l'enregistrement en moyen de production artistique durant les premières décennies du 20ème siècle.

Cette ferveur littéraire, plus particulièrement pour la poésie phonographique, ne donna pas lieu à l'époque à des réalisations concrètes.
La soirée d'enregistrement du 4 décembre à l'aide d'un phonographe, comme aurait pu le faire Apollinaire, proposait donc de concrétiser les ambitions artistiques du poète. Plus d'un siècle après ses articles dans "Les Soirées de Paris". Anne-James Chaton, Pierre Bastien et Félicia Atkinson furent enregistrés en réinscrivant à plusieurs reprises le même cylindre. Une fois le premier sillon gravé dans la cire, l'aiguille était replacée au début du cylindre avant que le performer ne reprenne et vienne superposer sa voix ou le son d'instruments au premier sillon, créant des strates de sons à la manière du re-recording ou de l'overdubbing réalisés avec des enregistreurs multipistes analogiques ou numériques.

Merci à Félicia Atkinson, Pierre Bastien et Anne-James Chaton qui ont accepté de se prêter au jeu.

Site des archives sonores contemporaines sur cylindre d'Aleksander Kolkowski:
www.phonographies.org

Sources:

Bruno Bossis, La voix et la machine. La vocalité artificielle dans la musique contemporaine, PUR, Rennes, 2005.

Marc Battier, " Des unanimistes à l'art sonore : quand la littérature, l'art et la musique recréent la technologie", in Musique et modernité en France (1910-1945), sous la direction de Sylvain Caron, François de Médicis et Michel Duchesneau, Presses de l'Université de Montréal, 2006.

www.labelle69.com/blog/extrait-production-reproduction-laszlo-moholy-nagy/
~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~
You sing with others while the phonographs gallop"
Guillaume Apollinaire, "Trees".

For the finissage of the exhibition "The Ghost in the Machine" inspired by the novel "L'Eve Future" by French author Villiers de L'Isle-Adam, artist Aleksander Kolkowski recorded on December 4th 2016 at Le Bon Accueil (Rennes-Fr) and in public on cylinder Félicia Atkinson , Pierre Bastien, Dinah Bird and Anne-James Chaton.
This re-enactment of phonographic recording sessions was inspired in part by the writings of Apollinaire who during the years of the First World War proposed to use the phonograph to create a simultaneous and phonographic poetry as well as poetic records. It was a matter of combining, superimposing several voices and sounds using the phonograph. He also quotes Villiers de L'Isle-Adam as a forerunner of "simultanéisme", who published "a play in which a large number of voices spoke at the same time saying different things."
The writings of Apollinaire and those of the Hungarian artist László Moholy-Nagy, who wanted to make the gramophone a tool of creation rather than mere reproduction device, testify the vigor of ideas transforming recording technology into a means of artistic production at the beginning of the 20st century.

This literary fervor, especially for phonographic poetry, did not give rise at the time to concrete realizations.
more than a century later, the recording evening of December 4 with the aid of a phonograph, proposed to concretize the phonographic poetry as Apollinaire could have done.
Anne-James Chaton, Pierre Bastien and Félicia Atkinson were recorded by repeatedly re-registering the same cylinder. Once the first groove was engraved in the wax, before the performer took over and superimposed his voice or the sound of instruments at the first furrow the needle of the phonograph was replacer at the beginning of the cylinder, creating layers of sounds in the manner of re-recording or overdubbing performed with analog or digital multitrack recorders.